Islande-France - 01.10.1949, Qupperneq 28
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ISLANDE - FRANCE
moitié du siécle, durant laquelle les
guerres de Richelieu et les événe-
ments de la Fronde inspirérent des
graveurs célébres comme Jacques
Callot et Abraham Bosse. Le gout
du fantastique monstrueux se perd
alors, bien qu’il en subsiste quelques
traces chez Callot. La caricature
devient plus réaliste. On voit re-
présenter certains types populaires
comme Mr. Goguelu, le Pique-as-
siette (déjá apparu á la fin du XVIe),
ou comme Jean Robert, sorte de
Jacques Bonhomme symbolisant
l’homme du peuple; et un Aca-
démicien, Gérard Audran, ne dé-
daigne pas de faire le portrait gravé
de Guillaume de Limoges, dit le
Gaillard boiteux, célébre chanteur
de complaintes établi sur le Pon-
Neuf. L’image est expressive et mou-
vementée, sans académisme, et s’ac-
compagne d’une poésie commeng-
ant ainsi:
“Ce Gaillard boiteux fait la nique
Par ses gestes et ses fagons
Aux plus grands maítres de musique
Quand il entonne ses chansons ...”
Cependant, la moitié des estampes
exposées appartiennent au XVIIIe
siécle. Dans l’ensemble, on peut dire
que celles-ci ont un caractére fran-
chement satirique. Elles reflétent
ainsi l’esprit frondeur du temps, et
soit qu’elles visent certaines person-
nalités, soit qu’elles fassent allusion
á certaines modes ou á certains usa-
ges, soit enfin qu’elles aient trait á
certains événements ou faits sensa-
tionnels, eller constituent de pré-
cieux documents historiques.
Nous y voyons ridiculisés les trai-
tants et les filles de joie, les ama-
teurs de tableaux italiens, les méde-
cins, les avocats, les fermiers-gé-
néraux, les critiques d’art, les nou-
vellistes qui se réunissaient dans les
jardins du Palais-Royal pour éla-
borer leurs gazettes. Des “carica-
tures á la grecque”, reprenant les
traditions du XVIe siécle, pour pro-
tester contre le mouvement artis-
tique du retour á l’antique, nous
montrent des personnages au
ventre fait d’un fronton de temple,
au buste fait d’un chapiteau. Les in-
venteurs et les physiciens ne sont
pas épargnés. “Le doigt magique”
raille Mesmer et le magnétisme
animal. Sur “La montagne accou-
chant d’une souris” nous voyons
l’aérostat de l’abbé Miollan et du
graveur Jaminet qui s’abat en flam-
me et nous lisons:
“Un chat miaulant faisant le
diable á quatre
Mettra l’alerte dans Paris.
On verra l’animal tellement se
débattre
Qu’une montagne en toile et
papier gris
Accouchera d’une souris”.
Et “Nous sommes ici” représente
une nacelle, surmontée d’un moulin
á vent et d’un parapluie, que flairent
des ánes á lunettes, allusion á l’as-
cension de Blanchard qui, en 1784,
partit en ballon du Champ de Mars
pour atterrir á Billancourt.
Toute une série de chromos se
compose de charges sur la mode des