Islande-France - 01.10.1949, Qupperneq 30
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ISLANDE - FRANCE
quand la France, du Xlle au XVe
siécle, était la premiére nation musi-
cale du monde.
A sa sortie de l’école en 1865,
Fauré est nommé organiste dans
une église de Rennes. Quelques pec-
cadilles lui valent un congé qui dé-
vait servir sa fortune. II revient á
Paris oú il retrouve Saint-Saéns. II
tient le grand orgue á Notre-Dame
de Clignancourt.
1870: c’est la guerre. Mobilisé
dans les voltigeurs, il combat á
Champigny. Si sa destinée est ten-
due vers un but élevé, sa vie n’en
est que plus laborieuse et plus dif-
ficile. Organiste á Saint-Honoré
d’Eylau, puis suppléant de Saint-
Saéns á la Madeleine, organiste du
choeur á Saint-Sulpice, enfin, maitre
de chapelle á la Madeleine, il doit
durement reconnaitre, en s’ exténu-
ant á donner cá et lá des legons, que
gagner sa vie c’est souvent la perdre.
En 1877, il accompagne Saint-
Saéns á Weimar, ou le généreux
Liszt fait représenter Samson et Da-
lila. Dans la compagnie d’André
Messager il se rend á Bayreuth.
L’initiation wagnérienne ne lui aura
pas été funeste. Dés ses premiéres
oeuvres et par elles, Fauré était lui-
méme.
II fréquentait chez l’illustre Pau-
line Viardot. II s’éprit de sa fille
Marianne. Beaux espoirs. Cruelle dé-
ception. Amour malheureux, dont
s’approfondira sa musique.
1896: il est nommé professeur de
composition au Conservatoire de
Paris, oú il succéde á Massenet; et
le voici tenant jusqu’en 1905 le
grand orgue de la Madeleine oú il
succéde á Saint-Saéns.
C’est á son enseignement qu’on
doit la renaissance du véritable es-
prit musical en France. Ses éléves,
Maurice Ravel, Ladmirault, Florent
Schmitt, Louis Aubert, Georges E-
nesco, Roger Ducasse, Raoul Lapar-
ra, E. Malherbe, Chales Koechlin,
Nadia Boulanger, s’accordent pour
dire qu’il ne les enseigna qu’afin
surtout de les éveiller á eux-mémes.
Toute liberté, toute licence méme,
sauf toutefois contre la beauté.
II les aimait, ils l’aimaient. Un
jour — c’était lorsque s’organisait
la Société Musicale Indépendante,
comprenant plusieurs des musiciens
cités ci-dessus, et dont il avait ac-
cepté d’étre le président — Fauré
regut de Saint-Saéns une lettre con-
tenant ces mots: “J’espére que tu
vas te désolidariser d’avec ces a-
paches”. Comme un de ses éléves se
récriait, il lui dit en souriant:
“Saint-Saéns fut mon maitre. Je
l’adore. C’est notre grand musicien.
Tous les arts lui sont familiers, á
l’exception pourtant du plus diffi-
cile de tous, celui de vieillir”.
En 1905; il est nommé directeur
du Conservatoire national de Mu-
sique. II y devait rester seize ans.
11 n’est pas exagéré de dire que —
sa venue ayant été, pour bien des
gens, un scandale, voire une révolu-
tion — son régne fut pour cette
grande école un temps prospére et
glorieux.
En 1909 il est appelé á l’Institut
oú il s’assied dans le fauteuil d’Er-
nest Reyer. Que dire encore? Son