Islande-France - 01.11.1947, Blaðsíða 14
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mais — et de lá vient leur impor-
tance — y apparaissent des concep-
tions trés élevées sur l’honneur, 1'
héroisme, la magnanimité, le tout
décrit avec un souci évident d’ob-
jectivité et de réalisme, et une cu-
riosité psychologique certaine. L’
auteur, qui se dissimule entiérement
sous son oeuvre, ne juge pas, n’
explique pas; mais, á l’aide d’un
vocabulaire et de tournures bien
choisis, il expose, mieux, il “fait
voir’' personnes et événements.
Dans la littérature mondiale, les
individus n’avaient jamais été aussi
hien peints qu’ici, mais ces individus
sont, en quelque sorte, ])ri.s dans le
filet de “circonstances fatales”: ils
peuvent vaincre leur destinée en vi-
vant ou mourant en harmonie avec
leur idéal d’héroisme.
L’évolution des “Sagas” a été
longue. Plusieurs chefs-d’oeuvre
pourraient étre cités, entre autres
la “Saga” du scalde Egill Skalla-
grimsson, Laxdaelasaga, Hrafnkels-
saga, Bandamannasaga. La plus im-
portante de toutes, Njalssaga, fut
probablement composée assez tard;
c’est une “oeuvre de fin d’été”, écrite
par un écrivain d’un remarquable
génie qui avait le don de peindre
ses héi’os. Son idée maitresse est
que les hommes sont prisonniers de
leur destinée, destinée qui est ce-
pendant en rapport étroit avec leurs
caractéi’es et leui’s actes. L’auteur ne
pi’ésente pas la solution de l’énig-
me á son lecteur; celui-ci reste avec
l’étonnement que l’on í’essent devant
un mystére.
Peindre la vie lnimaine avec un
tel réalisme, une telle objectivité
était un véritable “exploit” et les
“exploits” sont limités par le temps.
Les hommes n’ont pas coutume de
se maintenir longtcmps á un haut
degré de pei’fection. Aux sagas
mentionnées plus hlaut succédent des
liistoires fantastiques, des romans
de chevalerie, les “Fornaldarsögur”
(histoires des liéros des temps an-
ciens), et l’ancienne poésie céde la
place á de nouveaux genres.
Mais l’ancienne littératui’e islan-
daise vit; elle vit, honorée par la na-
tion qui líi ci’éa, honorée aussi par
les autres nations, et d’autant plus
appréciée qu’elle est mieux connue.
Einar Ól. Sveinsson.