Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1940, Side 27
LES ORGANES POLITIQUES EN FINLANDE 23
projetée par le président, celui-ci ne peut pas les y contraindre.
Cependant, méme dans ce cas, le président n’est pas obligé de
s’incliner. Au contraire, c’est précisément dans de telles circons-
tances que se manifeste l’efficacité pratique de la situation in-
dépendante et des pouvoirs étendus du président, qui, en temps
ordinaire, semblent invisibles derriére l’exercice actif de l’autorité
du cabinet. Dans ce cas le président, qui est lui-méme un organe
d’Etat complétement irresponsable du point de vue politique et
presque entiérement irresponsable du point de vue juridique,
n’aura qu’á s’entourer d’un conseil de ministres prét á prendre,
par sa collaboration, la responsabilité de la mesure projetée par
le président. En ce cas un principe du droit public finlandais qui
n’est pas écrit, mais dont l’existence n’est point douteuse, prend
une grande importance: les membres du cabinet dépendent non
seulement de la confiance de la Chambre des députés, mais égale-
ment et d’une maniére aussi nécessaire de celle du président. Celui-
ci peut congédier méme un ministére ayant la confiance de la
Chambre et choisir un autre. Si le président veut passer outre á
l’opposition du cabinet, il faut donc qu’il le congédie et qu’il en
nomme un nouveau qui soit disposé á assumer la responsabilité
de la mesure en question et á la rendre exécutable par son con-
cours. Les conséquences qui pourront résulter d’une intervention
personnelle aussi tranchante du président de la République en
opposition á la volonté du ministére parlementaire dépendent de
la situation politique au moment donné.
La position indépendante et l’étendue des pouvoirs individuels
du détenteur du pouvoir exécutif supréme ne se manifestent donc
en pratique que dans quelques cas exceptionnels, tout particuliére-
ment quand la situation politique a engendré un grave conflit
entre le chef de l’Etat et son ministére parlementaire et, par con-
séquent, également avec la Chambre des députés dont ce ministére
avait la confiance. Dans des conditions normales, l’influence du
président se manifeste évidemment moins que l’action du minis-
tére responsable. Alors méme cette influence de fait n’est pas
nécessairement insignifiante: tout dépend de la valeur personnelle
du président. Par sa haute situation, il peut exercer une influence
personnelle considérable, bien qu’invisible, sur le ministére res-
ponsable et sa politique quoique, quand il y a bonne entente, toute
l’action paraisse émaner du cabinet. C’est ce dernier qui, lorsqu’il
travaille avec la confiance du président et de la Chambre des