Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1940, Side 59
LES NÉGOCIATIONS DE CARLSTAD
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de Kongsvinger1) et de Frederiksten2) était ressentie par les Nor-
végiens comme une humiliation, on leur répondit: « Le 7 juin
était une humiliation pour la Suéde. » Si la demande de la dé-
molition des fortifications en coutait á la Norvége, il faudrait
se rappeler combien le 7 juin avait été pénible pour la Suéde.
Les jours passérent et les débats continuérent. C’étaient ces
discussions qui mettaient leur empreinte sur toute la conférence.
La question du démantélement et d’autres questions militaires
donnérent lieu á tout instant á des crises qui menacérent d’inter-
rompre les négociations.
A part les arguments d’ordre purement sentimental, le point
fondamental de l’argumentation suédoise était le suivant: Les
fortifications constituent une menace contre la Suéde. De quel-
ques-unes d’entre elles on peut tirer au-delá de la frontiére, et
c’est lá une vexation et un défi. Dans les milieux officiels et les
journaux norvégiens, on a déclaré autrefois que ces places avaient
un caractére non seulement défensif mais également offensif. Si
elles ne sont pas démolies, la Suéde sera obligée d’élever une ligne
de fortifications correspondantes de son cóté de la frontiére. Ces
menaces réciproques serviraient-elles la cause de la paix? Les
places de frontiére ne sauraient créer la paix, mais nuiraient au
contraire aux bons rapports entre les deux pays. Tel était le sen-
timent unanime du peuple suédois. La Suéde, qui avait vu dans
l’union une garantie de sa sécurité, recherchait une nouvelle
garantie. Quant aux événements du 7 juin, la Suéde aurait eu un
droit supérieur á celui qu’on faisait valoir actuellement.
Les délégués norvégiens, de leur cóté, soutenaient que Ies
Suédois partaient d’une fausse donnée. Les places de frontiére
*) La forteresse de Kongsvinger, située par 60° 12' latitude nord, avait
été élevée pendant la guerre de 1644—45 entre la Norvége et la Suéde.
Elle fut considérablement renforcée en 1670 par le maréchal de camp, le
comte Wedel. La forteresse devait servir de défense contre des invasions
Par la vieille route entre la Norvége et la Suéde.
2) La forteresse de Frederiksten, la porte d’irruption le plus au sud de
la Norvége, avait également été construite originairement pendant la guerre
de 1644—45. Les Suédois l’attaquérent vainement le 16 septembre 1658,
le 4 février 1659 et de janvier en février 1660. Pendant la période suivante,
la forteresse fut constamment renforcée. Charles XII l’attaqua en juillet
1716, mais dut se retirer avec de grandes pertes. Et lorsque, en novembre
1718, il établit un siége en régle, il tomba devant la forteresse, le 11 dé-
cembre. En aout 1814, enfin, á la veille de l’union avec la Suéde, les
troupes suédoises l’assiégérent en vain.