Islande-France - 01.10.1948, Síða 24

Islande-France - 01.10.1948, Síða 24
22 ISLANDE - FftANCE une effroyable tempéte, avec une vieille machine á bout, fut drossé, á cinq heures du matin, contre les récifs de Borgarfjordur. II touche brutalement á deux reprises. Le vieux bateau polaire a le cuir dur. II se couche sur tribord, puis se reléve, une fois encore. On tente inutilement de mouiller les ancres, mais avant que le “Pour- quoi-Pas” soit rappelé par elles, il s’écrase contre un rocher, arrache sa quille et commence á sombrer, submergé par des vagues géantes. C’est l’instant d’agonie ou Charcot va grandir jusqu’ á la mesure de l’épopée. II y suffira d’un cri, d’un geste. Un cri, cri de pitié, de douleur paternelle. Debout sur la passerelle, il voit les lames 'emporter un á un les jeunes hommes qui l’ont accom- pagné, et il gémit: “Mes pauvres en- fants!” C’est sur eux seuls qu’il pleure .... Un geste, geste á la fois d’une grandeur héro'ique et d’une admirable sensibilité humaine: il s’en va á la cage de sa mouettc familiére, la mouette de Rosa qu’il a recueillie trois semaines aupara- vant, et tandis que le bateau s’en- fonce sous lui, il libére l’oiseau aux ailes blanches. N’a-t-il pas voulu nous rappeler ainsi que, dans les pires cyclones, ou tout s’abíme el disparait, quelque chose peut et doit survivre, mais á condition de s’envoler? L’Islande, la Bretagnc .... Les deux pays qu’il ne séparait pas dans son coeur, ne se séparérent point non plus dans l’hommage rendu á sa dépouille et á celles de ses marins. Je puis dire aux Islandais que, dans la famille de Charcot, on garde une reconnaissance, qui durera autant que la vie, á la noble Islande pour l’accueil qu’elle sut faire, alors, aux morts héroiques du “Pourquoi-Pas”. La femme et les filles du com- mandant Charcot ont trouvé dans la piété islandaise envers leur grand mort, la seule consolation qui pút alors les atteindre. Aprés l’Islande, ce fut la Bretagne, patrie d’élection de Charcot, qui le regut sur les quais endeuillés dc Saint Malo. “II est des morts qui illuminent la mort méme”, s’écria le sénateur- maire de la ville-corsaire, quand le cercueil du commandant eut regu les suprémes honneurs. L’ Islande était-ellc absente de ces funérailles que la Bretagne fit au grand explorateur? Qui pourrait 1’ affirmer? II se passa une chose étrange lors de cette sépulture. Un vol de mouettes accourut de la mer et tourbillonna quelques instants au- dessus du cercueil. Puis toutes re- gagnérent le large, toutes sauf une qui, jusqu’au dernier instant, jus- qu’au moment oú le cercueil fut introduit dans le fourgon qui l’em- menait á Paris, voleta au-dessus de lui, trés bas, sans s’écarter une minute, méme pendant toute la durée des discours officiels. Cela frappa vivement tous les témoins, et Monique Charcot disait aprés la cérémonie á des amis: “Vous avez vu, c’était sa mouette!” Etait-ce vraiment la mouette Suite p. 29.

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