Islande-France - 01.10.1948, Side 6
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ISLANDE - FRANCE
IjU Poósie Isíítntiítis€»
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PAR LE
DR. SIGURÐUR NORDAL,
PROFFSSEUR Á LUNIVERSITÉ
DE REYKJAVlK
| ’ISLANDE csl
** la nation la
plus jeune de
l’Europe. Deux
cents ans ne
s’étaient pas
encore écoulées
depuis l’arrivée
des premiers
colons dans le
jiays que celui-ci
possédait déjá des Iiorames qui
avaient maítrisé l’art de l’écriture.
Quelques dizaines d’années plus tard
ces hommes commencérent á écrire
leur histoire, car ils avaient gardé
dans leur mémoire lc souvenir de
leurs vieilles jioésies et nombre
d’autres connaissances. Aussi les Is-
landais connaissent-ils avec une pré-
cision étonnante leur origine el leur
histoire la plus reculée. Ils ont pu, en
1874, commémorer le millénaire de
l’arrivée en Islande du premier colon;
en 1930 le souvenir en est encore
dans toutes les mémoires — celui de
leur Assemhlée Législative, l’Althing;
et ces fétes, préparées avec lc plus
grand soin, ne furent pas seulement
des actes commémoratifs mais con-
tribuérent á ranimer le sentiment
national et la foi dans l’avenir du
pays.
En 1948, les Islandais auraient eu,
dans le domaine littéraire, un mil-
lénaire á célébrer, et ils ne l’ont pas
íait; nous savons, en effet, avec
une quasi-certitude, en comparant
nos sources avec les récits anglo-
saxons, que c’est durant l’été 948
que le poéte Egill Skallagrimsson
récita devant le roi Erik Blodöx (*)’
á York, en Angleterre, le chant qu’il
a intitulé “Höfudlausn” (le rachat
de la téte). Ge chant est le premier
chant islandais dont nous connais-
sions l’auteur; c’est peut-étre le plus
ancien “chant panégyrique” royal
composé par un Islandais, c’est du
moins le premier oíi un poéte islan-
dais procéde d’une maniére tout á
fait originale. S’il est vrai de dire
que les Islandais se sont surtout
illustrés dans le domaine des lettres
et que c’est lá un des éléments vitaux
dc leur culture, il n’est i)as sans
intérét de consacrer une bréve étude
á unc oeuvre qui est á l’origine de
leur littérature.
La saga d’Eg'ill Skallagrimsson esl
l’un des chefs-d’oeuvre de la lit-
térature islandaise: d’ailleurs elle a
été composéé par notre plus grand
historien, Snorri Sturluson. Le récit
de l’entrevue d’Egill et du roi Erik
en constitue la partie la plus dramati-
que. Mais cette saga a été composée
environ 275 ans aprés l’événement,
*) Erik avait fait périr plusieurs de ses
fréres: de lá son surnom de „Blodöx“, litt.:
„la hache ensanglantée".