Gripla - 20.12.2018, Qupperneq 112
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avant de tenter d’apporter une réponse à cette question, soulignons que
l’ensemble des manuscrits de l’Óláfs saga ins helga (dans ses deux rédactions
successives) présentent ici la leçon fimm [cinq], à l’exception cependant
d’un manuscrit de la Grande Histoire du roi Olaf le Saint,10 le codex aM
325 V 4to, qui donne la leçon «.ij.»,11 et de la version de l’œuvre qui a été
interpolée dans le recueil de la Flateyjarbók, qui présente la même leçon,12
le nombre étant ici écrit en toutes lettres (au datif, comme le veut l’accord
avec l’appellatif konungum): tveimr [deux]. Il ne fait cependant aucun doute
qu’il s’agit là d’une innovation13 par rapport à la leçon fimm, laquelle figu-
rait certainement dans l’archétype des manuscrits de l’Óláfs saga ins helga,
si bien que l’on peut poser que le syntagme fimm konungar (cinq rois) cor-
respond bel et bien à l’intention de l’auteur.
Si le discours prononcé devant l’assemblée d’upsal devait être analysé
dans le seul cadre du chapitre lxxx de l’Óláfs saga ins helga, la question du
nombre surprenant de rois qui, selon l’orateur, furent suppliciés par les
anciens Suédois à une époque lointaine ne trouverait pas de réponse plau-
sible, d’autant moins que la harangue de Þorgnýr Þorgnýsson ne nous est
connue que par l’œuvre de Snorri Sturluson. Mais l’épisode de la séance
dramatique qui vit le roi Óláfr Eiríksson se soumettre entièrement à la vo-
lonté du magistrat du tíundaland n’est pas isolé au sein de l’Óláfs saga ins
helga : il s’insère dans un contexte historique qui a été rappelé plus haut et
10 Saga Óláfs konungs hins helga, 169.
11 au feuillet 28 v., col. a, l. 28 (renseignement aimablement communiqué par M. Peter
Springborg, qui a bien voulu vérifier cette lecture sur une photographie du manuscrit).
12 GKS 1005 fol. (f. 89r, col. a, l. 29), cf. Flateyjarbók. En Samling af norske Konge-Sagaer med
indskudte mindre Fortællinger om Begivenheder i og udenfor Norge samt Annaler I–III, éd.
Guðbrandur Vigfússon et C. r. unger (Christiania: Malling, 1860–1868), II 84. – Cette
leçon avait déjà été signalée par Helge Ljungberg (Den nordiska religionen och kristendomen.
Studier över det nordiska religionsskiftet under vikingatiden, nordiska texter och undersöknin-
gar 11 (Stockholm: Geber, 1938), 244, n. 1), suivi par olof Sundqvist (Freyr’s offspring. Rulers
and religion in ancient Svea society, Historia religionum 21 (uppsala: uppsala universitet,
2002), 184, 314), mais sans avoir été commentée, par manque de compréhension des rela-
tions qui existent entre les différentes versions de l’Óláfs saga ins helga et de son développe-
ment au sein de la Flateyjarbók.
13 Comme l’est la leçon Hálogaland à la fin du même chapitre dans la Flateyjarbók (éd. cit., 85)
là où tous les manuscrits de la Saga Óláfs konungs hins helga (éd. cit., 171) et de l’Óláfs saga
ins helga dans la Heimskringla II, 117 [ici au début du chapitre lxxxi]) présentent la leçon
Hǫrðaland.