Milli mála - 2017, Blaðsíða 98
L’IMPARFAIT, UN TEMPS À DEUX PROCÉDURES
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composé peut être ignorée puisque ce temps n’impose pas de vue sté-
réotypée et que l’énoncé est souvent pertinent dans le contexte le plus
accessible, même sans référence temporelle à un moment du passé.
L’interlocuteur n’applique donc la procédure temporelle dans le cas
du passé composé que si elle est peu coûteuse en énergie cognitive.
Cela explique le choix de l’imparfait pour communiquer des repré-
sentations aspectuo-temporelles marginales comme la vue itérative
ou l’ordre temporel négatif.
2. La procédure « non-temporelle » de l’imparfait
Mon analyse de l’imparfait est basée sur le principe fondamental de
la théorie de la pertinence (= TP) d’après laquelle tout acte de com-
munication ostensive communique la présomption de sa propre per-
tinence optimale. De cette présomption l’interlocuteur peut déduire
d’une part que l’acte est suffisamment pertinent pour contrebalencer
l’effort fourni pour son traitement et d’autre part qu’il est le plus
pertinent possible, compte tenu des compétences et des préférences
du communicateur2. Donc un interlocuteur qui traite un énoncé
dont le verbe est à l’imparfait est persuadé que ce temps, au mini-
mum, n’affaiblira pas cette présomption de pertinence. La question
qui se pose alors concerne les nombreux usages de l’imparfait qui
comme on le sait peut donner lieu à des interprétations temporelles
et modales, servir à communiquer l’aspect itératif, la politesse, l’hy-
pothèse, la contrefactualité et s’utilise souvent à la place d’autres
temps, comme le présent, le conditionnel ou le passé simple.
Comment l’interlocuteur peut-il encore se fier à la présomption de
pertinence optimale s’il doit consentir à faire un effort cognitif si
important pour sélectionner la bonne inteprétation, celle qui maxi-
malise les effets cognitifs de l’énoncé?
La réponse à cette question ne peut se limiter au cas isolé de l’im-
parfait. Elle doit nous suggérer quelque chose de plus fondamental
sur la fonction du verbe. C’est dans cette optique que des chercheurs
ont proposé que les temps verbaux, d’une manière générale, et l’im-
parfait n’est pas une exception, encodent, non pas des concepts, mais
2 Voir Sperber et Wilson, Relevance, 1995, p. 270.