Milli mála - 01.01.2013, Side 258
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davantage employé pour des raisons politiques (relations avec le
comte de Flandres) que parce qu’il était moins long (Le Patourel
1982 : 326). Il devait y avoir aussi des navires de transport qui as-
suraient une liaison Londres-Wissant, comme le suggère la descrip-
tion du voyage d’Yseut et de Brangien par Thomas dans son Tristan
(Payen 1989 : 233–234) :
[…] elles [Yseut et Brangien] s’en vont dans la nuit, secrètement, sans
faire de bruit et, par chance, franchissent une poterne dans le rempart,
pour déboucher sur la Tamise : à la marée montante (flot muntant), le
fleuve s’avance jusque-là. Le canot (bastel) les y attend : la reine y monte.
On avance à la rame (nagent), en profitant du reflux : le vent est favorable
et le canot rapide. Il faut faire vite, et l’on ne paresse pas : on ne lâche les
rames qu’une fois parvenus à la nef (grant nef). On hisse les voiles, on
prend le large. Tant que la brise est bonne, on prend de l’avance en lon-
geant les côtes françaises devant Wissant (Wizant), Boulogne (Buluingnë)
et le Tréport (Treisporz). Le vent, assez fort, est propice, et la nef qui les
conduit est légère. Ils passent au large de la Normandie : le voyage se
déroule bien et l’on se réjouit de naviguer si vite.
Quelles images pouvons-nous fournir de ces navires du milieu et de
la fin du xiie siècle, dont on entrevoit l’importance, en terme de
transport et de liaison maritimes, au travers les témoignages de
Wace et de Thomas ? Malheureusement, aucune épave de ces « fer-
ries » médiévaux n’a été découverte, que ce soit en Angleterre ou en
Normandie. En l’absence de vestiges matériels, les archéologues
n’hésitent pas à faire appel aux sceaux à figuration navale datés du
début du xiiie siècle, d’autant que leur matrice est souvent anté-
rieure. Mentionnons surtout le sceau de Dunwich et celui de
Sandwich, où le navire est représenté avec son annexe, le batel, à son
bord.
DES TEXTES DE MARINE EN DIALECTE NORMAND DU XII e SIèCLE