Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1942, Blaðsíða 313
LES LAPONS
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pas y avoir eu de raison plausible pour que ceux-ci voyagent
avec leurs troupeaux. L’élevage du renne doit étre apparu chez
les Lapons á une époque ou l’on commengait á comprendre qu’il
fallait épargner les rennes sauvages afin que la race ne soit pas
exterminée. Et la premiére forme d’élevage nomade des rennes
a probablement été une sorte de surveillance de chasse visant á
protéger les rennes contre les bétes carnassiéres et á tenir les
étrangers á distance du terrain de chasse. Ce qui est arrivé plus
tard a consisté principalement en une sélection naturelle. Les ren-
nes les plus peureux ont fui les hommes et sont restés sauvages,
tandis que les moins peureux se sont habitués á la proximité des
hommes. Par ailleurs, en prenant le chien á son service, l’homme
a été en mesure de diriger les mouvements des rennes á sa guise.
Mais cela n’est possible, bien entendu, que dans certaines limites,
l’élevage moderne du renne devant aussi tenir compte des instincts
de l’animal, de sa volonté de migration et, spécialement vers le
printemps, au moment ou la neige se recouvre d’une couche de
glace, le Lapon doit étre prét á partir, s’il ne veut pas perdre
son troupeau. Citons en passant que lorsque les conditions de
páturage sont bonnes, l’hiver est la période la plus calme pour
le gardien de rennes. En effet, les rennes avancent difficilement
dans la neige profonde et molle; et, pour surveiller les animaux,
il suffit, en général, de faire quelques fois par jour, en skis, le
tour du troupeau.
II semble bien naturel de supposer que la plus ancienne forme
d’élevage du renne ait consisté dans l’apprivoisement de rennes
isolés pour les utiliser comme animaux de trait. Les mots lapons
pour « apprivoisé » (domestique) et « dompter » (domestiquer),
ou pour mieux dire « dressé » et « dresser (á la voiture) », sont em-
pruntés au nordique primitif. On en a conclu que c’est des Scan-
dinaves que les Lappons ont appris á apprivoiser et á dresser ces
animaux. Mais il existe aussi d’autres termes d’origine scandinave
se rapportant á l’élevage du renne et cela doit nous engager á
la prudence. En effet, les Lapons avaient aussi dans l’ancien
temps emprunté des mots qui signifient « femelle de renne
stérile », « femelle du renne qui n’a qu’un seul bois », et plusieurs
autres de ce genre; á l’époque moderne, on a méme, dans cer-
taines régions, emprunté le mot ren (renne). Comment se fait-il
que les Lapons aient emprunté des expressions pour désigner
des notions si connues? On en trouve l’explication dans une cou-