Gripla - 01.01.2003, Blaðsíða 120
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tard nommé abbé ; l’évéque Heinrek de Winchester (« Vintoniensis » : c’est la
version de Maríu saga, on lit« Helarek » dans Karlamagnússaga), c'est-á-dire
sans doute Henri de Blois, évéque de Winchester (dans la version de KmsB,
contrairement á la Maríu saga, l’évéque est rebaptisé, et apparaít sans son
évéché : il s’agit ici vraisemblablement d’une omission volontaire), enfin le
nom de l’abbaye dans laquelle Wallterus est finalement élu abbé : Raudstock,
c'est-á-dire Rostock, legon probablement modifiée par le rédacteur de KmsB
(á la place de « Tauestock » dans Maríu saga), dans le diocése d’Exeter
(« Oxoniensis »).27
La présence de l’évéque Henri de Winchester — s’il s’agit bien du
personnage historique — dans la version compléte peut nous aider, sinon á
trouver la source précise de l’épisode, du moins á dater les faits : Henri fut
évéque entre 1129 et 1171. Puissant dignitaire ecclésiastique et proche de
Cluny, il fut trés ami avec Pierre le Vénérable. II est également connu pour ses
querelles avec les cisterciens, auxquels il s’opposa fréquemment, ce qui lui
valut l’antipathie de Bemard de Clairvaux.28 C’est sans doute ce qui explique
le début du miracle, dans lequel le moine gris est encouragé par Henri á
prendre l’habit noir. En amputant l’histoire de ses noms, la version KmsB tait
la responsabilité d’Henri dans le choix du moine.
Sur le plan du contenu, ce récit est, plus généralement, un miracle
traditionnel de la Vierge, c'est-á-dire une des innombrables intercessions de
Marie pour le rachat d’un pécheur endurci, qui l’a malgré tout honorée de son
vivant (en ployant le genou, en pleurant, ou comme ici, en regardant le ciel et
en soupirant á l’évocation de son nom). En voici le résumé (l’épisode, non
édité par Unger car considéré comme extérieur á la saga, ne figure pas non
plus dans la traduction frangaise):
Wallterus, un moine gris, change d’habit sur la demande de l’évéque
Helarek. II est ensuite élu abbé de son monastére de « Raudstock ». II
27 Précisions données par O.Widding et H. Bekker-Nielsen, ibid., p.77.
28 Dictionnaire d'histoire et de géographie ecclésiastique, sous la direction de R. Aubert,
vol.XXIII, col.1089 et suivantes. Henri de Blois, évéque de Winchester, était frére du roi
Etienne d’Angleterre et fut trés jeune envoyé á Cluny. 11 est mentionné par de nombreux
historiens de l’Eglise ou par des annalistes anglais (Orderic Vital, Henri de Huntingdon),
mais, comme le précise l’article du Dictionnaire, les seuls témoignages écrits de sa main sont
deux lettres écrites á l’abbé Suger (Migne PL 186, col. 1432 et 1434, epistolae CLXXl et
CLXXX). On trouve aussi deux lettres adressées á Henri par, respectivement, Bemard de
Clairvaux, (Migne PL 182, col. 225, epistola XCIII, datée par les éditeurs de 1132 environ)
et Pierre le Vénérable (Migne PL 189, col. 204, epistola. XIII).