Milli mála - 05.07.2016, Blaðsíða 118
FRANÇOIS HEENEN
Milli mála 7/2015
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choisit un certain nombre de prémisses quʼil a déjà en mémoire et
dont il espère que lʼunion avec lʼinformation quʼil traite, soit lui fera
inférer une thèse nouvelle qui améliorera sa connaissance du mon-
de, ou lui permettra de renforcer une thèse qui était déjà dans sa
mémoire, ou lui permettra dʼéliminer une thèse fausse. Ce qui distin-
gue en premier lieu cette théorie des autres théories « néo-
gricéennes », est de considérer que tout message verbal nʼest jamais
quʼune indication de la pensée que le locuteur veut communiquer,
ce qui signifie que les opérations inférentielles sont inévitables à tous
les niveaux de lʼinterprétation. Elles ne servent pas uniquement à tirer
un contenu implicite de lʼénoncé mais également à enrichir et dé-
sambiguïser sa forme.
Parmi les chercheurs pertinentistes certains se sont penchés sur
le problème posé par les expressions linguistiques apparemment sans
contenu conceptuel, comme les connecteurs de discours, et leur
contribution au processus dʼinterprétation. De ces recherches est née
la théorie des expressions procédurales qui encodent des instructions
sur la manière dʼorganiser lʼinformation conceptuelle communiquée
par lʼénoncé. Des recherches spécifiques ont été faites dans ce do-
maine notamment sur des connecteurs de lʼanglais comme but ou
however5. Un groupe de linguistes, principalement de lʼuniversité de
Genève, parmi lesquels Jean-Marc Luscher, Jacques Moeschler, Louis
de Saussure et Bertrand Sthioul, a élargi la notion dʼexpression pro-
cédurale aux morphèmes des temps verbaux et entre autres à celui
de lʼimparfait. Selon eux, lʼimparfait encode une procédure qui per-
met de saturer une variable P, appelée « point dʼappréhension du
procès », inclue dans le moment de lʼévénement et précédant le mo-
ment de lʼénonciation. La procédure consiste en une série de choix
qui sʼoffrent au destinataire de lʼénoncé en fonction des contraintes
contextuelles et sémantiques de lʼénoncé6.
5 Voir Diane Blakemore, Semantic Constraints on Relevance, Oxford : Blackwell,
1987.
6 Parmi les nombreuses publications des chercheurs de lʼécole de Genève, jʼen cite
ici deux qui traitent spécifiquement de lʼimparfait : Louis de Saussure et Bertrand
Sthioul, « L’imparfait narratif : point de vue (et images du monde) », Cahiers de
praxématique 32/1999, pp. 167-188, et Louis de Saussure et Bertrand Sthioul,
« Imparfait et enrichissement pragmatique », Nouveaux développement de