Milli mála - 05.07.2016, Qupperneq 124
FRANÇOIS HEENEN
Milli mála 7/2015
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térielle, ni de résultats dʼexpérimentations, mais le but de cet article
est de montrer que si on admet la présence automatique dans la
mémoire du destinataire, dʼhypothèses encyclopédiques et de thèses
dérivées à partir dʼelles, on arrive à voir dʼune façon homogène plu-
sieurs propriétés pragmatiques déjà constatées pour lʼimparfait,
comme celle dʼelle dʼêtre dépendant de lʼinterprétation dʼun autre
énoncé, de ralentir le tempo dʼun récit ou celle de contistituer un ar-
rière-plan17. Je vais montrer également que la procédure ainsi décrite
explique aussi bien des exemples standards que non-standards ou
stylistiques.
4. Lien avec la valeur imperfective
de lʼimparfait
Dans cette section nous allons voir que la procédure de lʼimparfait
telle que je lʼai décrite dans la dernière section pourrait être énoncée
comme « voir la structure interne de la situation, abstraction faite des
phases intiales et finales » ce qui la rapprocherait des définitions de
lʼaspect imperfectif de la typologie linguistique18. Remarquons
17 Lʼautomatisme avec lequel des représentations stéréotypées de la situation nous
viennent à lʼesprit, se ressent particulièrement bien lorsque nous interprétons des
exemples dʼénoncés à lʼimparfait décontextualisés comme celui-ci de Paul Imbs
(Paul Imbs, L’emploi des temps verbaux en français moderne. Essai de grammaire
descriptive, Paris : Klincksieck, 1968, p. 91) : « Marie-Dominique entra. Bernard la
suivait. » En lisant la seconde phrase nous imaginons automatiquement que Ber-
nard est derrière Marie-Dominique ce qui est dû à la force de lʼHE {quelquʼun
qui suit quelquʼun dʼautre est derrière cette personne}. Pour cette raison nous au-
rions tendance à rejeter la phrase, *Marie-Dominique entra. Cinq minutes plus
tard, Bernard la suivait », alors quʼelle serait acceptable si le dernier verbe était au
passé simple « Marie-Dominique entra. Cinq minutes plus tard, Bernard la suivit ».
La raison serait simplement que le sens de base de « suivit » peut lui sʼadapter en
« prendre la même direction que » ou « suivre les pas de » ce que nous refusons
de faire avec « suivait ».
18 Cette formulation de la procédure de lʼimparfait est adaptée dʼaprès la définition
de Henriëtte De Swart « The imperfective aspect « pays essential attention to the
internal structure of the situation » (Bernard Comrie, Aspect, Cambridge : Cam-
bridge University Press, 1976, p. 16) and abstracts away from initial and final
points (Carlota S. Smith, The Parameter of Aspect, Dordrecht : Kluwer Academic,
1991/1997) » dans Henriëtte De Swart, « Verbal Aspect », The Oxford Handbook of
Tense and Aspect, pp. 752-780, ici p. 757. Ma formulation est également parallèle
à la définition dʼAnne-Marie Berthonneau et Georges Kleiber, « situation dénotée
dans sa phase médiane, en déroulement, abstraction faite de son début et surtout
de sa fin », dans Anne-Marie Berthonneau et Georges Kleiber, « Pour une nouvel-