Milli mála - 05.07.2016, Síða 140
FRANÇOIS HEENEN
Milli mála 7/2015
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ment de lʼhistoire. Pour lʼimparfait narratif, j’ai suggéré que
lʼinterprétation de plusieurs phrases successives à lʼimparfait incitait
le destinataire à créer un contexte ad hoc, isolé du contexte général
dont il se sert pour interpréter la trame du récit. Voulant rentabiliser
lʼeffort consenti pour le traitement en apparence impertinent de ces
énoncés à lʼimparfait, le destinataire va synthétiser entre elles les RS
quʼil aura inféré, et trouver ainsi des thèses nouvelles. Il ressentira
donc un effet cognitif même si ces thèses ne seront pas directement
exploitables pour interpréter la suite du récit. Tous ces différents usa-
ges et propriétés de lʼimparfait sont donc traités dans le cadre de
mon hypothèse dʼune façon homogène et selon un seul principe
général de la communication, le principe de la pertinence.
Le fait de nʼavoir comme objet quʼune catégorie isolée dʼune
seule langue, en lʼoccurrence lʼimparfait du français, limite naturel-
lement la portée de mon analyse dʼautant plus que mes conclusions
contredisent en partie les opinions des aspectologues. Parmi les pro-
blèmes auxquels mon hypothèse devra certainement faire face, je ci-
terai celui du lien entre lʼaspect imperfectif et la notion dʼirréel38. Ce
lien est en effet souvent expliqué comme une conséquence de la no-
tion dʼincomplétude de la situation, reflétée dans lʼaspect imperfec-
tif39. Or cette notion dʼincomplétude ne joue aucun rôle dans la va-
leur procédurale de lʼimparfait telle que je la définis. Par conséquent
pour expliquer, dans le cadre de mon hypothèse, ce lien entre
lʼimparfait et lʼirréel, je devrai déterminer le rôle spécifique des RS
dans les usages contrefactuels et hypothétiques de lʼimparfait.
Il y a de nombreux autres prolongements nécessaires à mon
analyse. Il faut entre autre éclaircir le lien entre la valeur procédurale
et la description de lʼaspect imperfectif de la sémantique référentielle.
Il y a aussi certaines intuitions concernant la valeur aspectuelle de
lʼimparfait, comme celle que lʼaction dure ou est habituelle, qui né-
cessiteront des études particulières. Un objectif plus éloigné est de
38 Suzanne Fleischman, « Imperfective and Irrealis », Modality in Grammar and Dis-
course, éd. par Joan L. Bybee and Suzanne Fleischman, Amsterdam : John Ben-
jamins Press, 1995, pp. 519-551.
39 Ibid. et voir également Walter De Mulder et Frank Brisard, « Lʼimparfait marqueur
de réalité virtuelle », Cahier de praxématique 47/2006, pp. 97-124, p. 107 avec
dʼautres références sur le même thème.