Milli mála - 05.07.2016, Blaðsíða 201
SARA EHRLING, BRITT-MARIE KARLSSON
Milli mála 7/2015
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tions possibles du mot « phrase ». Ce terme pourrait représenter 1) la
paraphrase : le terme se référant alors au texte dans sa totalité com-
me une sorte de paraphrase de l’Énéide de Virgile (le texte est effec-
tivement désigné comme constituant une « fraze », un mot qui revient
en haut de chaque page : « fraze du premier livre », etc.) ; 2) une di-
gression (introduisant des matériaux qui ne font pas partie du texte
original, comme les différentes versions de la mort d’Hector dans le
deuxième livre) ; 3) des passages dans lesquels la traduction diffère
d’une manière significative du texte source sans que cela soit motivé
pour des raisons, par exemple, stylistiques.
Il y a quelques différences générales qui frappent immédiate-
ment un lecteur de la version crennoise de l’Énéide par rapport au
texte source : nous avons déjà commenté le fait que cette traduction
ne comporte que quatre des douze livres. On constate ensuite que,
tandis que l’Énéide de Virgile est une œuvre épique, composée par
des hexamètres, Crenne a choisi de donner sa version de l’Énéide en
prose. Se différenciant de celui de Virgile, le texte de Crenne est divi-
sé en chapitres, chacun d’eux étant introduit par un court résumé de
ce qui va suivre31.
Dans la dédicace, Crenne loue l’érudition de François Ier, qui
saura certainement s’apercevoir des ajouts qu’elle a faits au texte de
Virgile :
[…] ceste traduction, en laquelle la sublimité de vostre splendide
esperit, pourra cognoistre aulcune[s] choses servant au propos y
estre par moy adjoustées, & par especial au Second livre : au-
quel est faict mention de la deplorable fin du tresprestant & ma-
gnanime Hector, de l’illustrité duquel vostre preclaire progeniture
& tresanticque generosité a prins origine.
(Les Eneydes, trad. Crenne 1541, Epistre dedicatoire fol. ã iii)
Il s’agit par conséquent, entre autres, du récit de la mort d’Hector,
dont Crenne donne non moins de quatre versions différentes. Si
31 Anne Réach-Ngô, L’écriture éditoriale à la renaissance. Genèse et promotion du
récit sentimental français (1530-1560), Genève : Droz, 2013, fait remarquer que
ce genre de mise en chapitre (et en paragraphe) d’un texte était souvent dû aux
soins de l’imprimeur pour augmenter la lisibilité d’un ouvrage, témoignant alors
de « la participation de l’instance éditoriale à l’élaboration de la signification de
l’œuvre » (p. 148).