Milli mála - 01.06.2014, Blaðsíða 54
LES USAGES STYLISTIQUES DE L’IMPARFAIT
Milli mála 6/2014
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Afin de nous rendre compte de la différence entre cette définition
et l’ancienne, considérons l’exemple suivant :
22) « Jean se mit en route dans sa nouvelle Mercedes (El). Il attrapa
une contravention (E2). Il roulait trop vite (E3) »32
La question est de comprendre quel est l’antécédent de « roulait
trop vite ». Ni E1 ni E2 selon l’ancienne vue, car aucune de ces
deux actions ne rentrent globalement dans E3 : E1 est au moins en
partie postérieur à E3 et E2 lui est antérieur. La réponse serait que
l’antécédent est une phrase implicite comme « Jean se déplace en
voiture » que l’on peut facilement déduire de E1, mais l’association
entre cette phrase et E3 est contre-intuitive. Comme le disent An-
ne-Marie Berthonneau et Georges Kleiber « l’explication doit mani-
festement introduire un lien entre le fait d’avoir attrapé une contra-
vention et celui d’avoir roulé trop vite ».33 Si l’on admet maintenant
que E3 est ingrédient d’une situation saillante, comme la définition
ci-dessus nous suggère de faire, on n’aura aucun mal à établir un
lien entre E3 et E2 à savoir que le fait de rouler trop vite est la cau-
se de celui d’attraper une contravention. Anne-Marie Berthonneau
et Georges Kleiber précisent encore que leur théorie permet
d’expliquer pourquoi la variante suivante serait déviante :
23) « Jean se mit en route dans sa nouvelle Mercedes (El). Il attrapa
une contravention (E2). ? I1 roulait avec plaisir (E3) »34
D’après eux elle est déviante « parce qu’on ne voit pas en quoi
rouler avec plaisir » peut être considéré comme une partie anapho-
rique de attraper une contravention. »35
La théorie de l’anaphorique méronomique rend facilement
compte des différents usages de l’imparfait en discours.36 Selon An-
32 Berthonneau et Kleiber, « Pour une nouvelle approche de l’imparfait. L’imparfait, un temps
anaphorique méronomique », p. 68.
33 Ibid., p. 69.
34 Ibid., p. 69.
35 Ibid., p. 69.
36 Pour leur analyse de l’imparfait de rupture voir Anne-Marie Berthonneau et Georges Klei-
ber, « Pour une réanalyse de l’imparfait de rupture dans le cadre de l’hypothèse anaphorique
méronomique », Cahiers de praxématique 32/1999, pp. 119–166. Pour l’imparfait contre-factuel
voir Berthonneau et Kleiber, « Un imparfait de plus… et le train déraillait », et pour leur analyse
de l’imparfait de politesse voir Anne-Marie Berthonneau et Georges Kleiber, « Imparfait et
politesse : rupture ou cohésion ? », Travaux de linguistiques 29/1994, pp. 59–92.