Bibliotheca Arnamagnæana. Supplementum - 01.08.1967, Page 151
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de Ringerike; c’est d’ailleurs le seul spécimen de bois sculpté appartenant indubitablement á cette catégorie
de style que l’on connaisse. Les quatre fragments ont été datés de la premiére moitié du XIe (Kr. Eldjárn).
Les restes fragmentaires de la décoration trouvée á Hrafnagil dans le Eyjafjörður (fig. 41-47), une
planche et six morceaux de poteaux ou de planches épaisses, sont décorés de sarments enchevétrés et
d’animaux, le tout en relief. Ils rappellent, tout comme la porte d’église de Valþjófsstaðir dans la vallée
de Fljótsdalur, Islande de l’Est (fig. 48), les portails sculptés des églises norvégiennes en bois debout. Ils
nous donnent de brefs et rares aper^us sur la sculpture sur bois en Islande aux environs de 1200.
2. Styles roman et gothique jusqu’en 1550.
Dans la sculpture sur bois de l’Islande, le style qu’on pourrait appeler le style roman omnieuropéen est
représenté de la fafon la plus convaincante par les sculptures de deux planches trouvées á Laufás prés du
Eyjafjörður et de deux morceaux de planche et deux ais trouvés á Mælifell dans le Skagafjörður (fig.
49, 50, 53-56). On y trouve une frise de palmettes dont chacune est encadrée par ses propres tiges, et par
ailleurs des sarments, en partie avec figures animales. Les plantes ont une forme douce et arrondie carac-
téristique et les rinceaux s’enchevétrent et s’entrelacent. On estime que ces sculptures datent d’environ
1260. Une comparaison avec les enluminures des manuscrits islandais semble étayer une telle datation.
La décoration d’une planche trouvée á Munkaþverá dans le Eyjafjörður (fig. 51) est probablement la
plus ancienne en date aprés les sculptures de Laufás et de Mælifell. Ici le double sarment, qui sort de la
gueule d’un animal, donne une tout autre impression que les sarments de Laufás et de Mælifell. II est
mince, sec, a un caractére de ruban et sert d’encadrement á des scénes figurées. La conception du style de
l’époque gothique l’a, en partie, marqué de son empreinte. En le comparant avec deux portails d’églises
norvégiennes en bois debout et avec des formes végétales et des figures animales de manuscrits islandais,
nous serions enclin á le dater de la période 1300-1350. Une comparaison avec les enluminures semble par
ailleurs indiquer qu’un fragment de dos de chaise provenant du Skagafjörður et orné de figures humaines
et animales et d’un sarment d’aspect gothique (fig. 52) peut dater du XIVe et que les sculptures de quelques
bouts de planche trouvés á Hof, á Kjalarnes (fig. 57 et 58) datent d’environ 1400 ou d’un peu plus tard.
Ces derniers ont chacun un animal en relief (sans doute un cerf et un lion), en outre une palmette et une
pointe de feuille coupée.
Les deux chaises de Grund dans le Eyjafjörður (fig. 64 et 65) sont bien connues et on peut établir leur
datation d’une fagon assez exacte gráce á une lettre de prisée de 1551. Cette lettre nous fait savoir que
Þórunn, fille du dernier évéque catholique d’Islande Jón Arason (mort en 1550) et mariée au propriétaire
de la grande ferme de Grund, avait, entre autres choses, fait don á l’église de Grund de trois chaises sculp-
tées toutes neuves. L’une des chaises porte d’ailleurs son nom en caractéres runiques. Le style des sculp-
tures a été considéré comme ayant un caractére essentiellement roman ou l’on peut toutefois déceler une
certaine influence gothique (Matthías Þórðarson). Nous étudions l’ornementation végétale des chaises et
constatons que la caractéristique qui a été donnée du style peut également valoir pour cette derniére orne-
mentation méme lorsqu’on la considére á part. Les brefs apergus que la miniature islandaise peut donner
du style de cette période indiquent par ailleurs que l’ornementation des chaises n’était pas, á l’époque, un
phénoméne isolé, méme si elle remontait á des temps fort éloignés.
II semble que ce qu’on a appelé le retard stylistique de l’art islandais ne se soit pas trés nettement mani-
festé vis-á-vis de la Scandinavie avant 1300 environ. Mais aprés la Peste Noire en Norvége (1349-1350),
l’Islande et la Norvége firent sans doute figure de «pays arriérés» si on les considére du point de vue d’un
historien du style. II n’est guére exagéré de parler d’un retard nettement marqué de la sculpture sur bois