Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1944, Page 141
FINLANDE ET LES PAYS NÉO-LATINS
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preuve curieuse de l’ancienneté des rapports directs et spontanés
entre les intellectuels finnois et la civilisation néo-latine.
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La réforme luthérienne venait trés á propos pour le roi
Gustave Ier de Suéde, qui y voyait un excellent moyen de con-
solider le pouvoir royal et de l’affranchir de la tutelle de l’Église.
II obtint par « sa » réforme au moins autant d’avantages maté-
riels et politiqués que le roi Henri IV par sa célébre messe de
1593. La Finlande, qui, gráce, e. a., á la faiblesse du pouvoir cen-
tral du royaume de Suéde, avait constitué au moyen áge une sorte
d’autonomie ecclésiastique dirigée par les évéques de Turku, se
vit de plus en plus réduite á l’état d’une province, politiquement
égale, il est vrai, aux autres provinces de l’État suédois dont la
puissance politique était grande et la civilisation prospére. Notons
en passant qu’en 1528 le roi Gustave Ier donna l’ordre de raser
le cháteau fort de Kuusisto situé aux environs de Turku, siége
et symbole du pouvoir politique des évéques du diocése.
La politique du roi Gustave Ier Vasa contribua forcément et
bien naturellement á réduire au minimum les contacts directs de
l’ancien diocése catholique avec le continent.
II y a lieu de souligner aussi le caractére populaire de la ré-
forme luthérienne, propre á limiter, du moins dans son ardeur
primitive, l’intérét des intellectuels pour les autorités étrangéres
en général: Dieu devait étre mis á la portée de tous sans aucun
intermédiaire. Au lieu de la tendance á porter les dirigeants á un
niveau intellectuel aussi élevé que possible, c’est á son tour la péné-
tration de la bonne doctrine dans toutes les couches de la société
qui fut le but supréme du mouvement culturel de l’époque. Con-
formément á ce principe général, le réformateur de la Finlande,
Michel Agricola, créa une langue littéraire finnoise et s’intéressa
particuliérement á la propagation de l’instruction populaire. Mais
cette civilisation nationale, si l’on peut l’appeler ainsi, ne s’in-
spirait pas des universités des pays néo-latins ni de la littérature
de la Renaissance frangaise ou italienne. La vie culturelle de ces
pays devenait certainement de plus en plus inconnue á l’élite
intellectuelle de la Finlande. Et cependant la politique extérieure
des rois de Suéde du XVT siécle les mettait constamment en rela-
tions avec les puissances de l’Europe méridionale. De nombreux
Frangais se trouvaient alors au service des rois de Suéde. Ainsi,