Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1944, Page 186
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LE NORD
publia son Histoire de l’art suédois
á l’usage des étudiants. C’était la
premiére fois qu’un auteur unique
donnát une étude d’ensemble du
sujet.Tentative sagace et personnelle
d’établir des périodes et de systé-
matiser. Par ses formules concises,
souvent d’un style télégraphique,
par sa mise en lumiére énergique
de rapports et de contrastes, par son
souci des proportions, cet ouvrage
fut un manuel excellent, une clef
souple permettant d’ouvrir les com-
partiments divers de l’histoire de
l’art.
Si les ouvrages de 1913 et de
1935 s’occupaient, bien entendu,
tous deux de la question des traits
nationaux de l’art suédois, ils pré-
sentaient pourtant une différence.
En 1913, on ne pensait pas qu’il fut
possible d’observer aucune continui-
té organique dans l’évolution de
l’art suédois. Par art suédois on en-
tendait l’art exercé en Suéde au
cours des siécles, tant par des artistes
nationaux que par des artistes
étrangers. Malgré les emprunts et
les infiuences, malgré les maitres
étrangers, il était juste de qualifier
cet art de suédois et de le rattacher
au patrimoine national. Car il ex-
primait aprés tout des idées, des ha-
bitudes et des conditions du passé,
et il était une manifestation de la
volonté artistique des Suédois. Cette
volonté, on en retrouvait l’expression
surtout dans la noblesse simple, dans
l’emploi modéré des formes orne-
mentales, dans la recherche d’un
style grand et élevé. Le classicisme
de Tessin était considéré comme la
manifestation peut-étre « la plus
compléte du génie national dans le
passé de notre art ».
En 1935, M. Roosval pensait
constater une continuité réelle de
l’élément suédois, et il procéda á
une démonstration en régle. Pour
lui non plus, il n’était pas question
d’établir une distinction nette entre
artistes étrangers et artistes suédois.
Car souvent l’étranger pouvait con-
tribuer á créer précisément la forme
d’art qui devait traduire le caractére
suédois. Lorsque les cisterciens fran-
gais élevérent leurs églises sévéres et
claires, ils « portérent au cœur des
Suédois ». M. Roosval considére
comme la tendance dominante de
l’architecture suédoise sa forme cu-
bique. 11 analyse la nationalisation
des modéles, suit les transformations
en formes suédoises de l’architecture
gothique européenne aussi bien que
de celle de la fin de la Renaissance
italienne. Il montre de méme que
le réalisme nai'f de la sculpture go-
thique suédoise ne s’explique pas
tant par la technique grossiére de
l’artiste que par la volonté conscien
te de créer un style. On sent nette-
ment chez l’auteur le désir de rc-
trouver les caractéristiques suédoises
dans l’art populaire plutót que dans
l’art des hautes classes.
11 est intéressant de voir l’attitude
des historiens récents, M. Romdahl
et M. Lindblom, á l’égard de ce
probléme fondamental qu’est le style
suédois. Ils prennent des positions
diamétralement opposées. M. Rom-