Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1944, Side 298
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LE NORD
base parlementaire s’élargit, mais devint par suite d’autant plus
hétérogéne. Il n’est pas rare d’observer une tension trés prononcée
entre le gouvernement et la représentation nationale; l’exigence
parlementaire de confiance s’est affaiblie et se réduit souvent á
n’impliquer que l’acceptation de mauvaise gráce de moyens ex-
trémes. Il n’est donc pas étonnant que, dans ces conditions, la par-
tie de la Constitution qui fait concurrence au parlementarisme,
c’est-á-dire le pouvoir présidentiel, ait acquis certaines possibilités
d’action.
Quelques exemples viendront illustrer cette situation. En dé-
cembre 1932, le Président de la République, M. Svinhufvud, re-
fusa de soumettre un projet de loi sur la réglementation des inté-
réts que le gouvernement d’alors, le Cabinet Sunila, avait élaboré
et recommandé, il importe peu que ce n’ait pas été á l’unanimité.
Le résultat en fut la démission du Cabinet, remplacé par un nou-
veau gouvernement, le Cabinet Kivimáki, dont les attaches avec
le parlement étaient de nature tout á fait superficielle et qui se
montra disposé á prendre sur lui la responsabilité parlementaire
de la décision du Président. Profitant habilement de la situation
dans laquelle se trouvaient alors les partis politiques pour louvoyer
avec vigilance entre les rochers et les écueils, le Cabinet Kivimáki
réussit, en dépit des circonstances qui présidérent á son arrivée au
pouvoir et malgré son caractére de « Cabinet présidentiel », á
éviter le vote de méfiance et se maintint en fonction durant quatre
ans, longévité que n’avait encore connue aucun gouvernement
finlandais. Lorsque, vers la fin de l’automne 1936, le Cabinet
Kivimáki fut obligé de démissionner, M. Svinhufvud semble avoir
refusé, pour la formation du nouveau gouvernement, la colla-
boration des socialistes, ou posa en tout cas pour sa part des con-
ditions á une telle collaboration, procédé qui, émanant du chef
d’Etat d’un pays parlementaire, était extrémement curieux et pré-
sentait un grand intérét d’un point de vue de principe. Le Pré-
sident avait suffisamment d’autorité pour faire prévaloir sa vo-
lonté; le parlement se soumit, attendant la fin de la période pré-
sidentielle qui devait aboutir quelques mois plus tard et qui sem-
blait devoir amener un changement de président.
On pourrait citer quelques autres exemples, tirés de ces der-
niéres années — mais il convient cependant de se rappeler ici que
la situation extérieure de la Finlande au cours de ces années a sus-
cité des difficultés de caractére exceptionnel, en ce qui concerne
le fonctionnement du mécanisme parlementaire. En 1941, le Pré-