Milli mála - 01.06.2016, Blaðsíða 96
IMPARFAIT ET MODALITÉ
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on peut choisir {quelqu’un qui dort a les yeux fermés} ou {quelqu’un
qui dort est couché}. La notion d’incomplétude ou de non représen-
tation de la borne finale de l’action, généralement associée à l’aspect
imperfectif, est respectée par les RS puisque les hypothèses qui
marquent la fin de l’activité ne sont pas conservées à la même
adresse encyclopédique. Donc {rentrer} ne fera pas sélectionner les
mêmes hypothèses que {être de l’autre côté}7.
Ce qui selon ma théorie serait spécifique dans ce processus d’in-
terprétation enclenché par l’imparfait c’est le fait qu’il commence
invariablement par une consultation de la mémoire encyclopédique.
Pour cette raison je considère ce processus comme lié à une procé-
dure. Dans le cadre de la TP, un énoncé peut en effet donner accès à
deux types de données : des données conceptuelles, comme celles
liées au concept {chat}, et des données procédurales, comme celles
indiquées par exemple par {mais} ou d’autres connecteurs qui four-
nissent des informations sur la manière de traiter un énoncé8. L’idée
que les temps verbaux, et entre autres l’imparfait, indiquent des
procédures a été défendue notamment par Louis de Saussure et
Betrand Sthioul9. Mais pour ces auteurs la procédure s’applique sur
les variables reichenbachiennes E, R et S alors que celle que je
conçois a comme argument la forme propositionnelle complète de
l’énoncé10.
Mon hypothèse permet de voir une origine commune à certaines
propriétés pragmatiques caractéristiques des énoncés à l’imparfait,
notamment celle de constituer l’arrière-plan d’un récit ou celle d’être
dépendant d’une autre expression contenant un verbe au passé com-
7 Rien n’empêche cependant le destinataire d’inférer à partir de la RS une hypothèse décrivant la fin
de l’action. Voir une discussion sur de tels cas dans Heenen, « Imparfait et Stéréotypes », p. 142.
8 Voir Diane Blakemore, Semantic Constraints on Relevance, Oxford : Blackwell, 1987, p. 18.
9 Voir Louis de Saussure et Bertrand Sthioul, « L’imparfait narratif : point de vue (et images du
monde) », Cahiers de praxématique 32/1999, pp. 167-188, et Louis de Saussure et Bertrand Sthioul,
« Imparfait et enrichissement pragmatique », Nouveaux développement de l’imparfait : Textes réunis par
Emmanuelle Labeau et Pierre Larrivée, Cahier Chronos 14/2005, pp. 103-120. Voir également l’ana-
lyse procédurale de l’imparfait de l’espagnol dans Manuel Leonetti et Victoria Escandell-Vidal,
« On the Quotative Readings of Spanish Imperfecto », Cuadernos de Lingüística X, 2003, pp. 135-
154. Enfin Jacques Moeschler est l’auteur de nombreux articles récents sur l’approche procédurale
des temps verbaux. Voir par exemple Jacques Moeschler, « Where is procedural meaning located?
Evidence from discourse connectives and tenses », Lingua 175-176/2016, pp. 122-138.
10 S représente le moment de l’énonciation, R le point de repère et E la période où le procès est
réalisé. Voir Louis de Saussure et Bertrand Sthioul, « Imparfait et enrichissement pragmatique »,
version électronique sur le site https://www.researchgate.net/publication/241103057_Imparfait_
et_enrichissement_pragmatique, p. 3 (tiré le 20.12.2016).