Milli mála - 01.06.2016, Page 108
IMPARFAIT ET MODALITÉ
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d’imaginer une telle situation saillante.Voyons un tel cas :
15) « Si tu faisais attention tu ferais moins d’erreur. »
Ici la situation saillante pourrait être celle où le sujet ne faisait pas
attention à ce qu’il faisait. On pourrait imaginer comme forme
logique de cet énoncé :
{Si au moment t du passé où tu ne faisais pas attention *tu
faisais attention tu ferais moins d’erreur}
Mais pour que cette forme soit correcte il faudrait que le second
verbe soit au plus que parfait. Il est étonnant que même dans de tels
cas l’imparfait se rapporte à un événement du présent ou du futur, et
non du passé. Cette impossibilité d’imaginer le procès à un moment
passé, en plus de l’incompatibilité des adverbes exprimant une
valeur de passé avec la protase, nous incitent à penser que l’imparfait
dans les phrases hypothétiques n’encode pas le passé. L’interlocuteur
quand il interprète une telle phrase, ne choisit pas le présent plutôt
que le passé, il décode directement le présent de la protase.Voilà en
tout cas le principe sur lequel je vais baser mon analyse dont je fais
maintenant part .
Selon moi, siprés(p) et siimpf(p) communiquent l’une comme
l’autre que le locuteur entretient, ou en d’autres mots, interprète la
pensée p. Si le locuteur communique cette interprétation de p, c’est
parce qu’il la considère comme pertinente. Elle peut être pertinente
pour lui-même ou pour l’interlocuteur ou pour un autre individu. La
raison pour laquelle ces deux types de phrases hypothétiques enco-
dent la même information temporelle, malgré les temps différents
dans leurs propositions, est que la pensée p qui est interprétée inclut
un verbe au présent et que c’est cette pensée-là qui constitue la forme
propositionnelle de l’énoncé hypothétique. Il n’y a donc aucune diffé-
rence entre siprés(p) et siimpf(p) sur le plan temporel, la seule diffé-
rence entre elles est la valeur de la procédure non-temporelle exprimée
par la deuxième et pas par la première. Nous allons voir à travers les
exemples suivants que l’usage de l’imparfait dans les phrases hypot-
hétiques reflète la même stratégie communicative du locuteur que
celle dont nous avons parlé dans le chapitre précédent, à savoir, elle