Milli mála - 01.06.2016, Qupperneq 146
LE FRANÇAIS STRINDBERGIEN EN TRADUCTION
146 Milli mála 8/2016
traduction allemande. Celle-ci mène à l’inculpation de Strindberg,
du traducteur allemand et de l’éditeur en raison de son contenu
prétendument indécent. Le Plaidoyer paraît pour la première fois en
français en 1895, dans une édition profondément révisée par
Georges Loiseau2. Le texte français de Strindberg a été publié en
1999 dans le volume 25 de l’Édition nationale des Œuvres complètes
d’August Strindberg. Ce volume contient également une traduction
suédoise moderne du roman ainsi que des commentaires sur la
genèse du roman et sur le manuscrit original qui n’a été retrouvé
qu’en 19733.
Toutefois, jamais le roman n’est paru dans une version suédoise
autorisée par Strindberg. Il est vrai que deux traductions ont été
publiées de son vivant, l’une complète, parue en feuilleton dans la
revue Budkaflen de 1893–1894, l’autre incomplète, publiée en
fascicules par P. A. Nilsson en 1903. Dans les deux cas, Strindberg
a fortement réagi contre la publication et a réussi dans le second à
faire arrêter la publication après quelques fascicules. Ce n’est qu’en
1914, soit deux ans après la mort de l’auteur, que la première
traduction suédoise officielle a été publiée par John Landquist4.
Au vu des circonstances complexes de la rédaction, de la révision,
de la traduction et de la réception de ce roman, il n’est guère
surprenant de voir qu’il a fait l’objet de nombreuses études. Celles-
ci ont souvent révélé des tendances au nivellement, à la fois
linguistique et sémantique, dans les traductions. Cependant, elles
ont porté sur les premières traductions – allemandes, suédoises,
2 Voir Gunnel Engwall, « ‘Le Plaidoyer d’un fou’ : Un plaidoyer de Strindberg ou de Loiseau ? »,
Stockholm Studies in Modern Philology, New Series 6, Stockholm, 1980, pp. 29–54.
3 En dåres försvarstal, August Strindbergs Samlade Verk [SV] 25, Stockholm : Norstedts, 1999. Dans
nos exemples plus bas, nous citons le texte français de cette édition, à savoir « Le Plaidoyer d’un
fou », texte établi sans corrections ni modifications à partir du manuscrit original d’August
Strindberg par Gunnel Engwall, pp. 263–517. — L’édition, dite nationale à cause de subventions
de l’État suédois, ne contient pas uniquement toutes les œuvres écrites en suédois par Strindberg,
mais aussi celles rédigées directement en français, à savoir, outre Le Plaidoyer d’un fou, Inferno,
Légendes, les essais réunis sous le titre Vivisections II. Les commentaires incluent également ses
propres traductions en français, entre autres les drames Créanciers et Rêveries. Voir la note 33, plus
bas, pour des renseignements complémentaires sur cette édition.
4 Sur les deux premières traductions en suédois et surtout sur celle de Landquist, voir Gunnel
Engwall, article cité dans la note 1 ci-dessus ; Alexander Künzli et Gunnel Engwall, « ‘Le
Plaidoyer d’un fou’ de Strindberg en allemand », Actes du XVIIe Congrès des romanistes scandinaves,
éds Jukka Havu, Carita Klippi, Soili Hakulinen, Philippe Jacob et José Santisteban Fernández,
Tampere : Tampere University Press, 2010, pp. 569–583.