Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1941, Side 60
54
LE NORD
chrétienne si l’on veut, en négligeant les différences dogmatiques
— de l’humain dans la longue époque actuelle de crise et de triage.
Tout effort en ce sens doit étre aidé et soutenu; en Norvége
comme ailleurs, l’unité et la coopération est une táche de la plus
haute importance.
Il est difficile pour un étranger de se prononcer sur ce pro-
bléme en Danemark. A bien des égards les questions y sont les
mémes, bien que les conditions historiques y soient autres qu’en
Suéde et en Norvége. Je commencerai par signaler quelques don-
nées que j’ai déjá indiquées en partie.
J’ai nommé ci-dessus les remarquables études classiques, dont
l’influence s’est étendue bien au-delá des frontiéres du pays
(Madvig, Heiberg, et autres). Elles ont porté en premier lieu sur
la grammaire, l’édition et la restitution des textes, puis, quoique
avec un succés inégal, sur les problémes culturels. J’ai dit aussi
que ces études s’opposérent parfois nettement au christianisme;
peut-étre cette hostilité devait-elle parfois empécher la science
de constater quelques faits qui sont plus compréhensibles á des
savants qui ont une expérience intime de la religion. J’ignore
quelle a été l’importance de cette attitude pour l’enseignement
et les traditions universitaires.
Le fait est que le Danemark a eu une littérature humaniste
et classique de haute valeur. Cela n’empéche pas qu’elle y ait
adopté comme en Suéde une forme nettement gothique et nor-
dique; les deux classicismes ont été également admis et ont dominé
tour á tour, bien que Oehlenschlæger n’eut pas la méme facilité
que Tegnér pour passer d’un monde á l’autre. Cette poésie n’ap-
partient plus aux voix les plus fortes du temps, mais une fois
qu’elle s’est fait entendre avec netteté et avec force, ses effets
ne s’effacent jamais, mais réapparaissent aprés des périodes d’oubli
et pendant lesquelles d’autres notes ont dominé.
A ce propos il faudrait aussi parler de Yart, de la sculpture.
Aucun sculpteur nordique n’a comme Thorvaldsen dépassé les
cadres de son art, de son métier. Ce n’est pas ici l’endroit d’ap-
précier son art en général ni de juger le néo-classicisme de ses
paroles et de ses œuvres; c’est lá une question á part. Du point
de vue historique, il faut reconnaítre que beaucoup de ce qui est
prétendu ou proclamé classique n’est pas vrai ou parfaitement
vrai. En Suéde on a lu et admiré longtemps les imitations souvent
apocryphes d’Anacréon (les Anacréontea, connues par les traduc-
tions des théses de Tranér, réimprimées deux ou trois fois dans