Le Nord : revue internationale des Pays de Nord - 01.06.1941, Síða 62
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LE NORD
terait une étude spéciale. L’art de Thorvaldsen a certainement
exercé á cet égard une influence profonde, jouant ainsi un röle
important en faveur de l’humanisme, bien qu’il ne soit pas á la
mode d’en parler.
Quant aux luttes pour l’humanisme et l’humanité en Dane-
mark, il ne serait pas possible de ne pas parler de Grnndtvig,
quoiqu’il soit au point de vue humaniste á bien des égards un
esprit de contradiction. En tant qu’il s’agit du classique, en tout
cas du latin, Grundtvig est, malgré son éducation classique et
latine, un adversaire impitoyable. Je ne sais pas si la Gréce et
Rome lui ont donné quelque chose de durable, s’il en avait gardé
un souvenir vivant. A ce propos on peut penser au Norvégien
A. O. Vinje, á qui Sigmund Skard a consacré une pénétrante
étude (A. O. Vinje et l’antiquité, Oslo 1938); d’abord anti-clas-
sique radical, l’antiquité s’est révélée á lui petit á petit dans Homé-
re, profondément et inéluctablement, mais d’aprés les idées qu’on
avait alors de l’épopée. Grundtvig puisait la matiére de son puis-
sant humanisme á d’autres sources, quoi qu’il ait appris — malgré
lui — de l’humanisme ancien. C’est le Nord, le monde ger-
manique, qui doit compléter le christianisme — mais Grundtvig
est loin de la métaphysique raciste de nos jours (qui peut-étre est
déjá dépassée á l’heure actuelle). Aussi trouve-t-on dans son œuvre
et son enseignement une haute et large humanité, tentative
courageuse d’unir l’humanité riche et naturelle et la vie chrétienne,
une grande part de cette joie spontanée devant l’humain, le
travail, la pensée et l’art, qui a toujours distingué le christianisme
vivant, la reconnaissance envers Dieu pour ce qu’il nous a donné
non seulement par la nature et la création dans la nature, mais
encore par la création continue dans l’homme et par l’homme
dans la culture, la poésie, l’art et l’histoire. C’est lá, certes, un
humanisme chrétien trés net. II est évident qu’il peut entrer en
conflit avec certaines formes d’humanisme, tant un humanisme
surtout littéraire qu’un humanisme ouvertement hostile á la
religion — s’il est juste de le qualifier ainsi — qui a joué un grand
röle en Danemark et qui, malgré sa richesse littéraire et sa distinc-
tion, ne se fait guére remarquer par son esprit et sa tolérance,
tout en contenant beaucoup de pathétique sociale. (Pour Grundt-
vig voir Edv. Lehmann: Grundtvig och det danska jromhetslivet
(Grundtvig et la vie religieuse en Danemark), Sveriges kristliga
studentrörelses Förlag 1927.) Je ne m’occuperai pas davantage
de la lutte entre ces différents courants, qui ont eu des mérites;